30 juill., 2025

NFPA 660 : une norme unifiée pour une meilleure gestion des risques associés aux poussières combustibles

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  • NFPA660
  • poussière explosive
  • DHA

Les propriétaires et les responsables de la santé et de la sécurité des installations industrielles œuvrent dans un écosystème où règne une certaine confusion en matière de sécurité contre les explosions. Certain·e·s intervenant·e·s – qu’ils·elles représentent l’autorité ou les fournisseurs de services ou d’équipements – peuvent avancer une chose et son contraire, rendant ardue la tâche de distinguer ce qui est obligatoire de ce qui ne l’est pas. Tous·tes seront donc ravi·e·s d’apprendre que la nouvelle norme NFPA 660 entend contribuer à clarifier le message!

Cette norme propose en effet d’aborder les défis liés aux poussières combustibles et explosives à partir d’un seul document. Ce dernier regroupe à la fois les principes fondamentaux de la combustion et de l’inflammation ainsi que les règles applicables pour sécuriser les installations, que ce soit dans les industries du bois, de l’agroalimentaire, des métaux et autres.

Évitez de tomber dans le piège d’une protection insuffisante ou inachevée, ou à l’opposé, dans celui d’une surprotection qui va coûter beaucoup trop cher et sera particulièrement difficile à entretenir.

Cet article vous offre un tour d’horizon des nouveautés proposées dans la norme NFPA 660 pour mieux comprendre ce que signifie aujourd’hui une saine gestion des risques associés aux poussières combustibles.

  1. Un guide essentiel pour améliorer la sécurité de vos installations

    Bien que la plupart des normes de la National Fire Protection Association (NFPA) couvrent le sujet depuis plusieurs décennies déjà, la norme NFPA 660 représente une avancée majeure en matière d’évaluation et de gestion des risques liés aux poussières combustibles et explosives.

    Notons en premier lieu que ce document a été développé en regroupant toutes les normes NFPA dites « propres aux industries » (industry-specific standards) pour offrir un cadre d’application unifié et complet. Rappelons que ces exigences de sécurité étaient précédemment réparties dans les normes suivantes :

    • NFPA 61 pour les installations agroalimentaires
    • NFPA 484 pour la production, le traitement, la finition, la manutention, le recyclage, l’entreposage et l’utilisation de tous les métaux et alliages susceptibles de présenter un risque de combustion ou de déflagration
    • NFPA 654 pour la fabrication, le traitement et la manutention des particules solides combustibles
    • NFPA 655 pour le traitement et la manipulation du soufre sous forme solide ou fondue (molten)
    • NFPA 664 pour les installations de transformation et de travail du bois

    Maintenant désuètes, toutes ces normes font partie du plan de consolidation des documents portant sur les poussières combustibles, récemment complété avec la publication de la première édition de la norme NFPA 660. Les chapitres 21 à 25 sont consacrés à ces industries et intègrent les exigences propres à chacune d’elles (p. ex. Chapitre 21 – Secteurs agricole et agroalimentaire, Chapitre 24 – Travail et transformation du bois).

    Il est important de remarquer que les normes dites techniques comme NFPA 68, NFPA 69 et NFPA 77 ne sont pas incluses dans le plan de consolidation de l’organisation américaine et demeurent donc des documents indépendants et valides qu’il faudra continuer de suivre et d’appliquer.

    En matière d’analyse, les éléments fondamentaux relatifs à l’identification et à l’évaluation des risques et des dangers associés aux poussières combustibles sont inclus et renforcés dans la norme NFPA 660. Auparavant contenus partiellement dans chacune des normes propres aux industries ainsi que dans la norme NFPA 652 – Standard on the Fundamentals of Combustible Dust établie depuis 2015 comme document de référence en cette matière, les définitions générales, les requis et objectifs principaux, l’identification des dangers et le processus d’analyse de risques – nommé DHA pour dust hazard analysis – sont maintenant présentés dans les 10 premiers chapitres de la norme NFPA 660 (principes fondamentaux). La terminologie est également mise à jour, plusieurs définitions de termes techniques étant uniformisées; on y trouve entre autres des définitions pour les fibres inflammables (non déflagrantes, mais susceptibles de présenter un risque d’incendie), les fibres combustibles (déflagrantes), les poussières combustibles (solides combustibles finement divisés présentant un risque de déflagration) et les particules solides combustibles (fragments susceptibles de produire des poussières combustibles).

    Il faut également noter que le concept de système de gestion des changements (management of changes ou “MOC”) est maintenant clairement défini comme un système « exigeant l’analyse préalable de toute modification envisagée et susceptible d’affecter la nature ou les propriétés des matériaux en présence, les ressources humaines, les tâches exécutées par le personnel, la technologie et les équipements de procédé, les procédures ou les installations ». Une telle analyse visera notamment à :

    • Évaluer l’importance potentielle du changement sur le plan de la sécurité du procédé et des opérations;
    • Déterminer la nécessité d’implanter des mesures de contrôle et des dispositifs de sécurité supplémentaires;
    • Juger si des modifications doivent être apportées à d’autres systèmes de gestion en place pour la mise en œuvre sécuritaire du changement proposé.

    Mis en commun, ces différents principes et définitions permettent donc non seulement d’éliminer un bon nombre de disparités et d’incohérences qui existaient jusque-là entre les normes maintenant désuètes, mais également de résoudre d’éventuels conflits qui pourraient persister; l’approche proposée pour résoudre ces derniers consiste en l’application des règles suivantes (Section 1.6) :

    1. Les principes énoncés dans les chapitres propres aux industries ont préséance sur ceux présentés comme étant fondamentaux (chapitres 1 à 10).
    2. Si un principe énoncé dans l’un des chapitres propres aux industries consiste à interdire expressément une exigence fondamentale précisée aux chapitres 1 à 10, cette interdiction doit alors s’appliquer.
    3. En l’absence d’exigence ou d’interdiction spécifiques (ou dans le cas des sections dites « Réservées »), les principes fondamentaux des chapitres 1 à 10 doivent être appliqués.
    4. Un chapitre propre aux industries peut servir à établir des exigences non précisées dans les chapitres 1 à 10.

    Cette unification permet donc de simplifier la compréhension et la définition des risques associés aux poussières combustibles ainsi que d’opter pour une approche plus cohérente vers la mise en conformité des installations industrielles.

  2. Un document prêt à être adopté par les autorités provinciales

    La norme NFPA 660 est rédigée et conçue pour être adoptée comme un code par les différentes autorités compétentes. Ainsi, certaines provinces du Canada pourraient l’adopter directement comme code, ou simplement choisir de s’y référer.

    Rappelons qu’au Québec, seule province à avoir choisi cette approche en Amérique du Nord (Canada et États-Unis inclus), les normes NFPA propres aux industries telles que NFPA 61, NFPA 484, NFPA 654 et NFPA 664 sont incluses dans l’énoncé de l’article 58 et, par conséquent, applicables sur le territoire depuis la révision de 2007 du Règlement sur la santé et la sécurité du travail (CNESST, LRQ S-2.1, r. 13). Puisque ces normes sont maintenant désuètes, il est fort probable que l’autorité opte prochainement pour l’intégration de la norme NFPA 660 dans sa réglementation en mettant notamment à jour l’article 58.

    Dans les autres provinces au Canada ainsi que dans la grande majorité des États américains, à moins que de nouvelles approches soient adoptées, la norme NFPA 660 devrait demeurer une référence technique reconnue sans toutefois constituer une exigence ou un requis réglementaires. Il sera donc important de surveiller l’évolution des approches choisies par les différentes autorités locales en santé et sécurité du travail (p. ex. WorkSafeBC, l’Occupational Health and Safety en Alberta, le ministère du Travail, de l’Immigration, de la Formation et du Développement des compétences de l’Ontario, l’Occupational Safety and Health Administration des États-Unis).

    L’un des principaux critères évalués par les représentants des autorités en santé et sécurité au travail en Amérique du Nord est le niveau d’empoussièrement des différents secteurs d’une usine (voir figure suivante); il est important de rappeler que des accumulations trop importantes de poussières (fines) peut mener à un risque de seconde déflagration (ou seconde explosion), un évènement aux conséquences plus souvent qu’autrement catastrophiques.

  3. Une chose est certaine, les entreprises doivent se familiariser avec les exigences de la norme NFPA 660 et se préparer à son application, et ce, tant pour les nouveaux projets que dans le cadre de l’exploitation d’installations existantes.

  4. Des clarifications importantes

    La norme NFPA 660 propose de nouvelles exigences relatives à la réalisation d’analyses plus complètes et au renforcement de la sécurité des installations industrielles. Cela inclut notamment l’obligation de :

    • Former le personnel (formation initiale et formations d’appoint);
    • Réaliser une vérification préopérationnelle avant chaque redémarrage;
    • Mettre à niveau le plan de mesures d’urgence (PMU) pour s’assurer d’y inclure un volet spécifique aux poussières combustibles;
    • Définir avec précision le danger d’auto-échauffement (self heating).

    Le propriétaire d’une installation industrielle doit s’assurer de développer et de mettre en place un programme de formation qui met l’accent sur l’exposition potentielle aux dangers liés aux poussières combustibles, aux particules solides combustibles et aux fibres inflammables ou combustibles (déflagrantes). Ce programme doit s’adresser aux employé·e·s de l’usine ainsi qu’aux entrepreneurs, aux travailleur·euse·s temporaires et aux visiteur·euse·s susceptibles d’être exposé·e·s aux risques liés aux poussières combustibles ou de causer des situations dangereuses. En plus des éléments de base et des particularités relatives au procédé et à l’usine en question, le contenu de formation devra inclure la description précise des dangers présents dans l’environnement de travail, des plans d’intervention d’urgence applicables (p. ex. évacuation) et des règles de sécurité en place; des notions relatives au principe de fonctionnement des dispositifs de sécurité devraient également être incluses au contenu de la formation lorsque les travailleur·euse·s sont susceptibles d’être affecté·e·s (p. ex. évents de déflagration, clapet mécanique, système de suppression chimique). Une formation d’appoint doit être offerte au moins tous les trois ans (refresher training).

    Le propriétaire doit faire en sorte qu’une vérification préopérationnelle (Operational Readiness Review ou ORR) est réalisée afin d’assurer le démarrage sécuritaire des nouveaux systèmes ou procédés ou le redémarrage sécuritaire des installations existantes modifiées ou dont l’activité a été interrompue temporairement ou sur une plus longue période. Il s’agit d’un exercice consistant à vérifier que tous les moyens de contrôle et dispositifs de sécurité requis sont en place et que toutes les tâches et fonctions de sécurité (safety tasks) ont bien été accomplies.

    Le propriétaire doit également s’assurer qu’un PMU est élaboré et mis en place pour encadrer les actions à prendre plus particulièrement en cas de feu, d’embrasement éclair (flash fire) ou de déflagration de poussières combustibles. Il s’agit d’un complément aux exigences déjà applicables pour les entreprises en vertu des réglementations provinciales en matière de santé et sécurité au travail (p. ex. RSST au Québec) et aux recommandations notamment proposées par la norme CAN/CSA Z.731 – Planification des mesures et interventions d’urgence. Selon le chapitre 10 de la norme NFPA 660, un tel plan doit être revu et validé tous les ans, et doit notamment comprendre :

    • L’identification des moyens de communication et les numéros de téléphone d’urgence.
    • L’identification des zones de rassemblement.
    • Les noms des personnes désignées pour aviser les services d’urgence (p. ex. service incendie) et des personnes désignées pour rencontrer les intervenant·e·s d’urgence hors site pour la coordination de l’incident.
    • Les dessins de l’aménagement des installations, incluant les voies d’évacuation et les emplacements où sont entreposés les produits chimiques dangereux, et l’endroit où est situé l’équipement de protection incendie.
    • Les fiches de données de sécurité des produits chimiques ou dangereux.
    • Les rôles et responsabilités de chacun·e lors de l’intervention d’urgence (tous·tes les occupant·e·s).

    La préparation et l’implantation d’un PMU sont requises pour les nouveaux établissements, mais également rétroactivement pour les installations existantes.

    Enfin, dans le cadre des activités d’identification des risques et des dangers, le propriétaire doit porter une attention particulière au phénomène d’auto-échauffement susceptible de survenir en présence de particules solides combustibles et de poussières combustibles. Ce danger est notamment susceptible d’être présent dans les silos et autres équipements d’entreposage, ainsi que dans les parties de procédé ou les sections d’équipements où de l’accumulation de matériel peut se produire en condition normale ou anormale d’opération (p. ex. chute bouchée, conduit de dépoussiérage). Un risque d’auto-échauffement est suspecté et des dispositions doivent être prévues (solutions de contrôle) si au moins une des conditions suivantes est présente:

    • Entreposage en vrac ou transport de particules solides combustibles en quantités excédant 1000 kg (voir figure suivante);
    • Présence de plus de 10 kg de matériel à haute température à la sortie d’un procédé de séchage (séchoir) dans une benne ou une trémie;
    • Scénario d’auto-échauffement identifié lors de l’analyse de risques.
  5. Soulignons que l’équipe de BBA Consultants propose une assistance technique unique et à l’avant-garde en cette matière, dont des services allant de l’échantillonnage en usine aux analyses en laboratoire, en passant par la confirmation des risques, l’identification des solutions de contrôle possibles et la préparation des procédures de sécurité à mettre en place. Pour en savoir plus, consultez notre article technique sur l’auto-échauffement (à venir) ainsi que la norme EN-15188:2020.

  6. Pour conclure

    À court terme, et notamment par suite de la publication de la norme unifiée NFPA 660, le propriétaire d'une usine dans laquelle sont utilisées, produites ou générées des poussières combustibles en Amérique du Nord doit s’assurer de réaliser une DHA couvrant l’ensemble de ses installations, ou de mettre à jour toute analyse effectuée au cours des dernières années. Les actions suivantes devront notamment faire partie des mesures mises en place:

    1. La formation du personnel: Offrir une formation adéquate et complète au personnel de l'usine ainsi qu'aux entrepreneurs, aux travailleurs temporaires et aux visiteurs (risques associés aux poussières combustibles); une formation d'appoint doit être offerte au moins tous les trois (3) ans.
    2. La mise en place d’une procédure de vérification pré-opérationnelle (systématique): Assurer le démarrage sécuritaire des nouveaux systèmes ou le redémarrage sécuritaire des installations existantes modifiées ou dont l'activité a été interrompue temporairement (ex. : arrêt annuel d’usine).
    3. La mise à niveau du plan de mesures d'urgence (PMU): Identifier et encadrer les actions à prendre en cas de feu, d'embrasement éclair (flash fire) ou de déflagration de poussières combustibles, et les intégrer au PMU; le plan doit être revu et validé tous les ans.
    4. L’évaluation du danger d'auto-échauffement: Porter une attention particulière au phénomène d'auto-échauffement susceptible de survenir en présence de particules solides combustibles et de poussières combustibles (ex. : entreposage en vrac, matériel à haute température).
    5. La mise en place d’un système de suivi des changements (MOC): Assurer l’identification et le contrôle des impacts sur la gestion des risques de toute modification envisagée et notamment susceptible d'affecter la nature ou les propriétés des matériaux en présence, les ressources humaines, les tâches exécutées par le personnel, la technologie et les équipements de procédé, les procédures ou les installations.

    La norme NFPA 660 représente un outil unifié indispensable pour les entreprises et installations industrielles où sont produites ou manipulées des fibres inflammables ou combustibles (déflagrantes), des poussières combustibles et des particules solides combustibles. Ce document propose notamment une centralisation des définitions et des méthodologies d’évaluation des dangers et des risques (principes fondamentaux), incluant des ajouts comme la définition précise de ce que doit être un système de gestion des changements et de nouvelles exigences, dont l’évaluation des risques d’auto-échauffement, d’instabilité thermique, de réactivité de l’eau et de réactivité chimique des matériaux en présence. Il est également important de noter que la norme NFPA 660 comprend une annexe informelle exhaustive qui présente les résultats de tests de laboratoire montrant les propriétés d’une multitude de poussières combustibles issues de toutes sortes d’industries (Annexe Y).

    Que ce soit pour mettre à jour votre analyse de risques ou pour en effectuer une première selon les standards de la norme NFPA 660, pour offrir une formation complète et pertinente à vos équipes, pour vous accompagner dans l’évaluation des risques d’auto-échauffement ou encore pour implanter ou mettre à jour vos procédures (p. ex. VPO, PMU), l’équipe d’expert·e·s de BBA Consultants est là pour vous depuis plus de 25 ans!

  7. Vous doutez de l’impact de la nouvelle norme sur vos installations? Vous avez des questions ou des inquiétudes? Contactez notre équipe d’expert·e·s disponible pour vous aider à bien cerner les différents changements à apporter.

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